Le commerce des armes est florissant en Afrique du Nord. En
2011, l’Algérie est même devenue le pays le plus dépensier d’Afrique en terme
d’armement, avec la bagatelle de 6,5 milliards d’euros de budget militaire. Une
somme qui ferait presque passer les 2,4 milliards marocains pour des
broutilles.
Le phénomène ne fait que s’accentuer : l’Afrique du Nord, et
en particulier l’Algérie et le Maroc (sans compter la Libye dont le changement
de régime brouille la donne), est une terre propice pour les vendeurs d'armes
qui y ont écoulé 9% du volume mondial de leur marchandise en 2011. Selon le
Stockholm International Peace Research Institute (Sipri), l’Algérie caracole en
tête des importateurs d’armes en Afrique avec 6,5 milliards d’euros de dépenses
l’année dernière. Au point de dépasser l’Afrique du Sud, pourtant habituel
leader de ce classement, qui reste tout de même seconde avec 3,7 milliards
d’euros.
En dix ans, Alger a même fait exploser son budget militaire
de 1 038%, et se trouve seulement dépassée par l’Angola ( + 2 059%, pour 2,8
milliards d’euros de dépenses annuelles en 2011). Tous les secteurs de l’armée
algérienne ont été rénovés. En juillet 2011, le gouvernement allemand a ainsi
annoncé un accord pour des livraisons de matériel à hauteur de 10 milliards sur
dix ans, comprenant des blindés de transport, des véhicules tout-terrain ou
encore des frégates. Selon le quotidien économique moscovite Vedomosti, à la
même période, une négociation était conclue pour la livraison de 120 chars par
l’entreprise publique russe Rosoboronexport, qui avait déjà reçu commande pour
environ 5,5 milliards d’euros de chasseurs de type Su-30MKA, en 2006 et 2010.
En échange, la Russie a même effacé la dette algérienne contractée envers
Moscou à l’ère soviétique, soit 3,6 milliards d’euros.
Printemps arabe et lutte contre le terrorisme ?
L’effet du Printemps arabe n’est pas à négliger. Alors que
se déroulaient les révolutions en Tunisie, en Égypte et en Libye, l’Algérie
négociait en effet avec l’Allemagne et la Russie pour s'équiper en blindés. Une
façon de se prémunir contre une « menace intérieure » et de prévenir les
retombées de la crise libyenne, la crise au Mali ne faisant qu’accentuer cette
nécessité alors qu’Al Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) prend de plus en plus
d'importance dans le Sahel.
Le voisin marocain n’est pas en reste. La coopération
maritime entre le Maroc et l’Otan sur les rives de la Méditerranée a ainsi
poussé le royaume à la dépense. La lutte mondiale contre le terrorisme lancée
en 2002 par l’administration Bush justifie ainsi l’intérêt de l’organisation
atlantique pour la région, identifiée comme une zone de transits et de trafics
illégaux, ou pouvant servir de refuge aux réseaux terroristes. Au niveau de la
Marine, Rabat a notamment signé des contrats avec les Pays-Bas en septembre
2009 pour 555 millions d’euros et portant sur trois frégates construites par
l’entreprise Demen Schelde Naval Shipbuilding.
Surenchère
Cette boulimie algéro-marocaine dans le secteur des armes
n’est pas nouvelle. Elle tient d’une course à l’armement sur fond de tensions
au Sahara occidental depuis le retrait de l’Espagne de la zone et le soutien de
l’Algérie à la République arabe sahraouie démocratique (RASD). Si le royaume
est loin derrière son voisin en 2011, son budget militaire tutoie les 2,5
milliards d’euros, ce qui représente entre 3,5 et 4% de son produit intérieur
brut (PIB), au même titre que l’Algérie (contre moins de 2% pour la France par
exemple).
Le domaine de l'aviation notamment est à la pointe de cette
évoluion. En 2006, Alger signait le contrat d'acquisition d'une soixantaine
d'avions de combat, les fameux Su-30MKA, avec la Russie. Et, un an plus tard,
c’était au tour de Rabat de commander 24 chasseurs F-16 à l’entreprise
américaine Lockheed Martin, pour 1,67 milliard d’euros. Non sans avoir au
passage décliné l’offre de la France pour les avions Rafale, Paris ayant tout
de même, pour 350 millions d’euros, modernisé la flottille de Mirage F-1 du
Royaume.
Une frénésie militaire qui fait chaque année les mêmes
heureux : la Russie, qui fait toujours figure d’eldorado en termes de marché
d’armes, et l’Allemagne côtoient la République tchèque, l’Italie et la France
au rang de fournisseurs privilégiés de l’Algérie. L’industrie militaire
française joue même sur tous les tableaux dans la course aux armements dans la
région. Pour la seule année 2007, elle avait ainsi vendu à Alger quelque 36
millions d’euros d’armes légères tout en fournissant 25 millions du même type
de matériel à Rabat. Sans même parler de ses tentatives pour vendre des Rafale
à la Libye de Kaddafi...
Source: Jeuneafrique.com
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